Pour savoir comment gérer la peur, il convent au préalable de comprendre son fonctionnement, de connaître ses ruses et, surtout, de savoir à quoi elle sert. En effet, la peur est une émotion primaire qui a une utilité : celle de vous protéger. Zoom sur les fondamentaux de la peur…

Dans la famille des émotions, je demande la peur ! Enfin, je ne la demande pas, elle surgit souvent d’elle-même sans qu’on ne l’invite. Car c’est un fait : nous pouvons être submergés par nos peurs comme, parfois, par celles des autres. Pour prendre une image, la peur s’érige souvent en nous comme une barrière interne, comme une boule de feu ou un parasite qui nous envahit et télescope notre action naturelle.

Bref, nous voudrions nous débarrasser de ces peurs envahissantes et parasites qui nous collent souvent comme le sparadrap du capitaine Haddock. Comment faire ? Pour mieux gérer la peur, je vous propose une plongée dans son royaume. A vos marques, prêt.e, partez…

1. La peur est une émotion parmi d’autres

La peur est une émotion puissante, mais ce n’est pas la seule. Dans la carte des émotions, elle figure parmi les quatre émotions primaires. Les trois autres sont la colère, la tristesse et la joie.

A ces quatre émotions primaires, certains ajoutent deux autres émotions : le dégoût et la surprise. Cette dernière est, par définition, une émotion éphémère qui, une fois l’effet de surprise passé, laisse place à une autre émotion, par exemple la colère, la peur ou la joie.

Connaître cette carte des six émotions est essentiel pour distinguer la peur sans la confondre avec les autres émotions. Surtout que, pour un même événement, différentes émotions peuvent succéder. Nous pouvons, par exemple, ressentir tour à tour peur, colère et tristesse à quelques secondes ou minutes d’intervalles. En revanche, nous ne pouvons pas ressentir plusieurs émotions en même temps.

2. La peur endosse différents habits

La peur est une émotion primaire qui compte de très nombreuses variantes. En clair, elle s’habille de 1001 façons. Celles-ci sont plus ou moins intenses et ont des manifestations variables dans la vie personnelle ou vie au travail.

Quand on a peur, on peut être : affolé, alarmé, angoissé, anxieux, apeuré, choqué, craintif, déconcerté, dérouté, désemparé, désorienté, déstabilisé, effaré, effrayé, épouvanté, horrifié, inquiet, intimidé, mal à l’aise, paniqué, sur le qui-vive, terrifié, terrorisé, etc.

Ces différentes formes de peur ont des manifestations physiques et des manifestations psychiques différentes selon les moments, les situations et les personnes :

• Les manifestations physiques peuvent se traduire par des tensions musculaires, de la transpiration, des tremblements, un comportement de retrait, voire une paralysie, etc.
• La peur peut générer des troubles psychiques (troubles de la pensée), par exemple une incapacité de réfléchir, une observation partielle et déformée de la réalité, etc.

3. La peur n’est pas une émotion négative : elle nous protège

Même lorsqu’elle est envahissante et désagréable, la peur n’est pas une émotion négative. Décryptons. Comme toutes les émotions, la peur a une fonction utile. Elle est une réaction au danger, à la menace ou encore à l’inconnu. Sa fonction utile est de nous alerter et nous faire réagir afin de nous mettre en sécurité.

Elle répond ainsi à un besoin primaire : celui d’être protégé, de nous sentir en sécurité. Mais cette réponse est-elle toujours pertinente ? A vous de vous poser cette question.

4. Le lien entre le danger et la peur est imaginaire

Voici une phrase très déstabilisante que j’aime beaucoup : « Le lien entre le danger et la peur est imaginaire. » En effet, la peur est une construction de l’esprit. Et cette construction est d’une redoutable efficacité : la peur coupe tous les circuits de réflexion. Elle surgit telle une pensée automatique, mises en lumière par le coaching cognitif et comportemental.

Le plus étonnant est que le danger qui génère la peur peut être réel mais également totalement hypothétique ou imaginaire. Dans ce dernier cas, la peur est une émotion clairement inappropriée.

Bonne nouvelle cependant : si l’esprit peut construire une idée de danger, il peut construire une autre pensée : une pensée alternative à la peur, une pensée plus adéquate, plus agréable et toute aussi efficace ou même plus.

5. Les questions à se poser pour mieux gérer la peur

Toute la problématique des peurs envahissantes et parasites tient aux réponses apportées à cinq questions :

• De quoi cette peur me protège-t-elle ?
Autrement dit, à quoi sert ma peur ? De quel danger supposé me protège-t-elle ? Que me permet-elle ?

• Ce danger est-il réel ou imaginaire ?
Autrement dit, ma peur est-elle liée à des faits tangibles et observables ou, au contraire, à une interprétation sans fondement ou qui pourrait être erronée ? Est-elle liée à la situation présente ou à une crainte de résurgence du passé ? Suis-je en train d’opérer une confusion ou un transfert entre différentes situations ou personnes, entre le présent et le passé ? Suis-je saisi par un comportement réflexe ? Suis-je d’accord pour que les peurs de mon passé continuent de guider et définir mon avenir ?

• Ma peur est-elle proportionnée ou disproportionnée au danger ?
Autrement dit : avez-vous surréagi ? Une autre variante de la famille de la peur serait-elle mieux proportionnée et adaptée au danger et risque encouru ? Par exemple, face à cette situation, ne devrais-je pas être simplement inquiet.e au lieu d’être paniqué.e ou terrifié.e ? Etes-vous pris.e par le bais de catastrophisation, celui où tout est érigé au rang de catastrophe ?

• Ma peur est-elle productive ou contreproductive ?
L’approche du coaching cognitif et comportemental qualifie les émotions d’« appropriées » quand elles aident la personne à atteindre ses buts. Au contraire, elles sont « impropres » quand elles contribuent à faire échec à ses objectifs principaux. Autrement dit, votre peur est-elle efficace (productive) ou inefficace (contreproductive) pour vous-même ?

Si vous ressentez une peur trop envahissante, désagréable ou qui génère un comportement inefficace, le temps est peut-être venu de lâcher cette peur pour adopter une attitude de vigilance et un comportement efficient qui vous sécuriseront tout autant, voire davantage.

• La question joker : Qu’est-ce que je ferais si je n’avais pas peur ?
Une autre voie pour gérer la peur est de la court-circuiter par la question « Qu’est-ce que je ferais si je n’avais pas peur ? » Une question pertinente dans des situations où la peur bloque les comportements naturels. Se la poser peut permettre de recréer un lien direct entre soi et l’action comportementale que l’on souhaite mettre en place.

Enfin, n’oubliez pas que la personne qui vous fait face est un être humain comme vous. Et elle aussi a ses peurs.

Sylvain Seyrig, coach professionnel à Paris

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