Métaphore de la résilience humaine, le Kintsugi est cet art japonais de la réparation des porcelaines et des poteries qui magnifie les cassures avec de la poudre d’or. Afin de faire le parallèle entre cet art et la résilience humaine, j’ai testé un atelier de kintsugi à Paris.

Signifiant littéralement « jointure en or », le Kintsugi est un art japonais développé au 16e siècle, où l’on répare les porcelaines et les poteries en sublimant les cassures avec de la poudre d’or. Ainsi, l’objet cassé n’est plus remis au rebut. Il reprend une nouvelle vie, non en revenant à son état initial et en masquant les brisures, mais en devenant une œuvre d’art unique qui célèbre les cassures, signes des épreuves du temps et des accidents de la vie.

Devenu métaphore de la résilience humaine, le kintsugi est aujourd’hui pratiqué en France par des restaurateurs d’art. Plusieurs ateliers d’initiation sont proposés. Travaillant sur la résilience, j’ai testé l’un d’eux récemment. Ce jour-là, j’ai donné une nouvelle vie à une vieille assiette en porcelaine brisée en quatre morceaux. La voici :

De cette expérience, je tisse des liens entre kintsugi et résilience :

• Comme la résilience humaine, le kintsugi permet à l’objet (à l’humain pour la résilience humaine) de retrouver son unité et son entièreté. L’objet n’est plus cassé. Il n’est plus en trois, quatre ou mille morceaux.
• Le kintsugi est une histoire d’acceptation. Acceptation des cassures et des blessures, acceptation que les accidents de la vie restent visibles. Acceptation d’être recollé et que tout ne redeviendra pas comme avant. Acceptation sans honte, sans besoin de cacher ce qui a été.
• Le kintsugi est un travail de patience et de précision. Prendre le temps de récupérer tous les morceaux de l’objet cassé, les rassembler, les recoller, combler les vides avec une pâte spéciale qui se travaille, passer finement une laque au pinceau, puis de la poudre d’or. Laisser sécher. Tout cela nécessite du temps, beaucoup de temps. Le vrai kintsugi prend des semaines, voire des mois. Que dire de la résilience humaine…
• Avec le kintsugi, l’objet réparé a des fragilités. Toutefois, ses jointures à la poudre d’or lui confèrent une beauté et une force incroyables, uniques. La réparation redonne de la confiance et de l’optimisme. N’en est-il pas de même pour les personnes qui pansent les blessures et les traumas qu’elles ont traversés.

Le Kintsugi vu par Sarkis et Bernardaud

En photo, j’ai pris le parti de mettre en avant les superbes porcelaines de Sarkis, éditées par Bernardaud et inspirées par le Kintsugi.
Plasticien français d’origine arménienne, né à Istanbul en 1938, Sarkis vit et travaille à Paris depuis 1964. « Mon travail est toujours lié à la mémoire. Tout ce que j’ai vécu y est », confie-t-il sur le site internet de Bernardaud, manufacture qui édite de la porcelaine de Limoges depuis 1863. « Je suis fasciné par cette technique japonaise appelée « Kintsugi » du 16e siècle, qui consiste à rendre visible des réparations sur céramique faites avec un mélange de laque et d’or donnant ainsi une valeur esthétique encore plus grande. »

Le Kintsugi vu par Jeanne Benameur

Dans son joli roman La Patience des traces, riche en voyages intérieurs, Jeanne Benameur laisse à son personnage central, Simon, le soin de découvrir le Kintsugi lors d’une retraite dans les terres reculées du Japon : « Il fait un peu sombre à l’intérieur et d’abord Simon ne voit pas grand-chose (…). Il suit la ligne d’or qui relie deux bords opposés (…). On est heureux de redonner vie à ce qui était voué à l’anéantissement. On marque l’empreinte de la brisure. On la montre. C’est la nouvelle vie qui commence. »

• En savoir plus sur la collection Kintsugi Bernardaud par Sarkis :
www.bernardaud.com

• A lire : La Patience des traces, Jeanne Benameur, Ed. Actes Sud, 2002, 19,50 euros

Un grand merci à mon amie Véronique qui m’a offert cet atelier riche en expérience.

Sylvain Seyrig, coach professionnel à Paris

> En savoir plus sur la définition et le fonctionnement de la résilience