Faut-il écrire un texte avec ChatGPT ? En quoi l’Intelligence artificielle change-t-elle le rapport à l’écriture et la relation entre auteurs et lecteurs ? Vais-je plonger ou non dans l’univers ChatGPT ? Éléments de réponse…

« Le désir de jouir de toutes les choses de la terre par le truchement de l’âme des mots. » Cette citation de Stefan Zweig a bercé mon adolescence et ma vie d’adulte. Ces quelques mots sublimes ont été écrits dans La Confusion des sentiments, paru en 1927. Tout au long de ma vie, j’ai écrit. Des textes, des articles, des interviews, des bouts de romans non publiés, des billets de blogs, des rapports d’activité, des lettres, des sms, des messages Whatsapp… Des mots et des phrases par milliers. Une écriture fluide ou laborieuse, selon les moments et les âges de la vie.

Naturellement, je n’ai pas inventé la poudre… Avant de rédiger des écrits professionnels, je me suis renseigné, j’ai enquêté, interviewé des personnes, discuté, lu d’autres textes. J’ai aussi creusé mes méninges. Je le confesse toutefois : il m’arrive de glisser jusqu’à la paresse en cherchant une infos sur un « truc » qui s’appelle Wikipédia. Et j’utilise fréquemment un moteur de recherche internet dont le nom commence par un G. Oui, je l’avoue…

Vivre dans un monde préservé, où l’écriture se réfléchit

Venons-en à ChatGPT, dont beaucoup de personnes parlent ici et là, dans les médias, dans mon entourage jusqu’aux plus proches amis. Pour l’instant, j’ai pris le parti de me préserver, de ne pas regarder, de ne pas lire, de ne pas tester les productions de ChatGPT. Vivre encore quelques temps (le plus longtemps possible, j’ose espérer) dans un monde préservé, où l’écriture se réfléchit, se travaille. Où elle fait vibrer celle ou celui qui écrit. Plonger dans la rédaction d’un texte comme nous plongeons les mains dans la terre, pour le façonner à notre façon. Pour que la pensée soit prise avec recul, qu’elle soit filtrée et devienne eau claire. Pour que le plaisir d’écrire soit le plus fort, que le plaisir de clarifier et donner forme à une pensée soit le plus fort.

Notre écriture vient du cœur et détient la vibration humaine originelle

Car l’écriture humaine se distingue promptement de l’écriture Intelligence artificielle (IA). Elle vient du cœur et détient la vibration humaine originelle. Lorsque nous écrivons, nous écrivons avec notre cœur. Notre rythme cardiaque et nos émotions guident nos doigts. L’écriture IA n’est au minimum qu’une deuxième main. Forcément. Au-delà d’un savoir encyclopédique ou informatif, un texte rédigé par une âme humaine dévoile avec subtilité les lumières et les ombres de son auteur. En ce sens, elle est un hommage à Jung. Ce dévoilement des lumières et des ombres est l’un des grands intérêts de l’écriture. Et l’on peut revenir ici à la citation de Stefan Zweig : « Le désir de jouir de toutes les choses de la terre par le truchement de l’âme des mots. » La production ChatGPT ne connaît pas cette jouissance même si elle peut satisfaire et faire jouir (accidentellement) celle ou celui qui le lit.

A l’écrit comme à l’oral, la richesse des mots crée ainsi un autre rapport à la réalité, lui apportant la nuance, la sensibilité, la conversation. Hors, que connaît l’IA à la sensibilité des choses, à la nuance, à l’art de la conversation ? L’IA est dans la radicalité, dans la soumission de l’humain à la réalité qu’elle édicte sans nuance, avec la seule logique qui est celle d’un algorithme.

Que devient la communauté d’esprit entre auteurs et lecteurs ?

Un autre élément fondamental distingue les deux écritures. L’écriture humaine tisse un lien réel ou imaginaire entre le lecteur et l’auteur, qu’il soit écrivain, journaliste, blogger, manager celle ou celui qui lit un discours… Tous deux sont reliés et peuvent appartenir à la même communauté. Ce qui n’est pas possible avec l’IA et ChatGPT, l’auteur n’existant plus ! Et si le texte rédigé par l’IA est porté par une âme humaine, celle-ci ne prend-elle pas les habits de faussaire à l’instar de ces personnes célèbres qui publient romans et biographies rédigés par un écrivain de l’ombre ? Les vibrations des mots ne créent ici aucune communauté rassemblant auteur et lecteur.

Naturellement, je ne suis pas contre toute Intelligence artificielle dans notre société. L’IA apporte, par exemple, des progrès considérables en médecine, notamment en cancérologie. Pour autant, sur ce blog, je prends le parti d’écrire sans ChatGPT ou consorts. Peut-être un jour changerai-je d’avis. Qui sait…

Sylvain Seyrig, coach professionnel à Paris

Article écrit sans aucune utilisation de ChatGPT

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